Les Origines
Dans les sources égyptiennes, suivis par les auteurs bibliques, l’historiographie classique ainsi que par l’épigraphie punique1 , l’autochtone porte l’ethnonyme « Rebou » ou « Libou ». La Libye désigne le territoire des « Libous » ; on en trouve l’écho dans les récits homériques : « cette Libye où les agneaux ont des cornes dès leur naissance, où du prince au berger, tout homme a son content de fromage, de viande et de laitage ; les bêtes tous les jours accourent à la traite, car trois fois dans l’année les brebis mettent bas2 » .
Pour une enquête sur la Libye et les Libyens, on peut glaner des informations dans les sources classiques. Nous nous contenterons de citer quelques auteurs de l’Antiquité qui en avaient eu à parler. D’après Hérodote, « …en Libye, les bords de la mer qui la limite vers le Nord à partir de l’Egypte jusqu’au Cap Soloeis, qui marque la fin du continent libyen, sont habités d’un bout à l’autre par des hommes de race libyenne divisés en nombreuses peuplades, sauf les parties occupées par des Grecs et des Phéniciens.3 » . L’Afrique semble, donc, avoir connu la stabilisation d’une ethnie aux composantes multiples ; en effet, Hérodote reconnait l’unité ethnique des libyens dont les territoires s’étendaient le long des côtes septentrionales de l’Afrique, depuis l’Egypte jusqu’au Cap Soloeis, c’est-à-dire de la Grande Syrte à la Maurétanie. L’historien grec distingue, par ailleurs, l’endogène de l’exogène, c’est-à-dire l’autochtone de « race libyenne » des étrangers, qu’il s’agisse de Grecs ou de Phéniciens. Les libyens, d’après Pline l’Ancien, sont la population nord-africaine ; quant au terme « libyque », le naturaliste grec l’utilise pour qualifier certains produits animaux et végétaux de la contrée libyenne. Dans son livre sur la Guerre de Jugurtha, Salluste, en se référant à une traduction des Livres Puniques attribués au roi Hiempsal, ne manqua pas de poser le problème des origines des Africains : « Les premiers habitants de l’Afrique furent les Gétules et les Libyens, gens grossiers et barbares qui se nourrissaient de la chair des bêtes sauvages ou de l’herbe des prés à la façon des troupeaux. Ils étaient gouvernés ni par la coutume, ni par la loi, ni par un maître4 » . D’après ce texte, Salluste distingue dans les populations africaines, un fonds libyque et un fonds gétule. Il s’agit, en fait, d’une distinction entre des « sédentaires » qui sont les Libyens et des nomades qui sont les Gétules. Sur la base de cet échantillonnage représentatif des données fournies par l’historiographie classique, nous avons pu constater que les auteurs de l’Antiquité se sont intéressés aux territoires des Libyens, à leur mode de vie, à leurs traditions, à leur système tribal, à leur organisation politique, à leur religion, et à leur faciès ethnoculturel. Bien que de la Préhistoire jusqu’à l’Histoire, une langue et une écriture se soient concrétisées, on a l’impression que les sources classiques restèrent indifférentes à ce propos. Pour Salluste, la langue des Libyens était une langue barbare .
[1] A titre d’exemple, nous citons l’inscription libyco-punique de Mactaris où nous lisons BSD LBYM que J.-G. Février traduisit « au pays des Libyens » : J. –G. Février, 1949, p. 85.
[2] L’Odyssée, « Poésie Homérique » Tome I : chants I-VII, texte établi et traduit par V. Bérard, 6ème tirage, Paris (Les Belles Lettres), 1962, 85-90.
[3] Hérodote, Histoire II, 32 (texte établi et traduit par Ph.-E. Legrand), Paris (Les Belles-Lettres), 2002,
[4] Salluste, La Guerre de Jugurtha, XVII, 1-2 (texte établi et traduit par A. Ernand), Paris 2003, (Les Belles-Lettres), 1-2.
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